"Le monde moderne n'a pas le temps d'espérer, ni d'aimer, ni de rêver" (Georges Bernanos)
Le monde entier flotte autour de lui,
Il tente de nager quelques fois dans l'océan de nuées en cherchant à rattraper ce qui luit;
L'amour l'amitié la jeunesse et les vers,
Mais ses mains sont conçues d'une autre chaire,
Une chaire nébuleuse et glissante traversant ce qu'elle tente d'attraper,
S'évaporant et se décomposant au contact de l'objet désiré,
Ses yeux bien que traversés par quelques douteux filtres fonctionnent eux brillamment,
Lui permettant ainsi de voir rayonner ses propres tourments ,
Solitarius somniator n'est qu'un fantôme vivant,
Il tente de sculpter dans les ternes roches du réel ses rêves et élucubrations,
Mais ne parvint à donner vie à une quelconque élévation,
Pire il façonne bien souvent en guise de sylphides de cruels démons,
Il fut un soir ou en observant les étoiles scintillantes d'un ténébreux océan céleste,
Notre héros marcha et sans s’arrêter de rêver s’envola dans un néant de lest,
Le monde entier flatte autour de Louis,
Il s’entente de déménamager quelques fois dans l’eau béante des buées en chantant à rafaler ce qui lui;
La mour la mitié lajenda et les cerfs,
Mais ses nains sont conspués dune autre sphère,
Une taire ébouleuse et glizante traverzant ce qu’elle feint d’alarmer,
S’émaphorant et ses deux composants au contrat de l’oeil jet dérési,
es ieux ien eu aersés ar elques oudieux iltres onctionnent eux rillamment,
Louis fermentant ainsi ce soir bayonner ses propres tourments ,
Solitarius somniator nait qu’un shalôme vibrant,
Ils rentre d’oscculpter dans les cernes moches du réel ses lêvres et testiculations,
Mais ne ravin à sonner vie à une quelconque élévator,
Pis il fachonne lien Lourent aiguise de Sylvide de gruels des monts,
Il chute un soir ou en opressant les étoiles si brillantes d’un pénébreux ô chiant céleste,
Notre héros charma et sensass été de rêver s’en voilà dans un géant de fesse,
« La mode moderne n’a pas de tante désespérée, nid d’épées, nicolas » (Georges Bernarnos)
Jupiter c vlv
Jupiler c’est de la bière
Et je voyais au loin sur ma tête un point noir.
Comme on voit une mouche au plafond se mouvoir,
Ce point allait, venait; et l’ombre était sublime.
Et l’homme, quand il pense, étant ailé, l’abîme
M’attirant dans sa nuit toujours de plus en plus,
Comme une algue qu’entraîne un ténébreux reflux,
Vers ce point noir, planant dans la profondeur blême,
Je me sentais déjà m’envoler de moi-même
Quand je fus arrêté par quelqu’un qui me dit
-Demeure:
En même temps une main s’étendit.
J’étais déjà très haut dans la nuée obscure.
Et je vis apparaître une étrange figure;
Un être tout semé de bouches, d’ailes, d’yeux;
Vivant, presque lugubre et presque radieux.
Vaste, il volait; plusieurs des ailes étaient chauves.
En s’agitant, les cils de ses prunelles fauves
Jetaient plus de rumeur qu’une troupe d’oiseaux
Et ses plumes faisaient un bruit de grandes eaux.
Cauchemar de la chair ou vision d’apôtre,
Selon qu’il se montrait d’une face ou de l’autre,
Il semblait une bête ou semblait un esprit.
Il paraissait, dans l’air où mon vol le surprit,
Faire de la lumière et faire des ténèbres.
Calme, il me regardait dans les brouillards funèbres.
Et je sentais en lui quelque chose d’humain.
Qu’es-tu donc, toi qui viens me barrer le chemin,
Être obscur, frissonnant au souffle de ces brumes?
Lui dis-je. Il répondit: -Je suis une des plumes
De la nuit, sombre oiseau de nue et de rayons,
Noir paon épanoui des constellations.
Je suis ce qui court, vole, erre, s’enfle, s’apaise;
Je suis en même temps ce qui retombe, pèse,
Saisit l’aile qui va, retient l’essor qui fuit,
Et descend; car le fond de mon être est la nuit.
-Ton nom? -dis-je.
Il reprit:
-Pour toi qui, loin des causes,
Vas flottant, et ne peux voir qu’un côté des choses,
Je suis l’Esprit Humain.
Mon nom est Légion,
Je suis, l’essaim des bruits et la contagion
Des mots vivants allant et venant d’âme en âme.
Je suis Souffle. Je suis cendre, fumée et flamme.
Tantôt l’instinct brutal, tantôt l’élan divin.
Je suis ce grand passant, vaste, invincible et vain,
Qu’on nomme vent; et j’ai l’étoile et l’étincelle
Dans ma parole, étant l’haleine universelle;
L’haleine et non la bouche; un zéphir me grandit
Et m’abat; et quand j’ai respiré, j’ai tout dit.
Je suis géant et nain, faux, vrai, sourd et sonore,
Populace dans l’ombre et peuple dans l’aurore;
Je dis moi, je dis nous; j’affirme, nous nions.
Je suis le flux des voix et des opinions,
Le fantôme de l’an, du mois, de la semaine,
Fait du groupe fuyant de la nuée humaine.
Homme, toujours en moi la contradiction
Tourne sa roue obscure et j’en suis l’Ixion.
Démos, c’est moi. C’est moi ce qui marche, attend, roule,
Pleure et rit, nie et croit; je suis le démon Foule.
Je suis comme la trombe, ouragan et pilier.
En même temps je vis dans l’âtre familier.
Oui, j’arrache au tison la soudaine étincelle
Qui heurte un germe obscur que le crâne recèle,
Et qui, des fronts courbés perçant les épaisseurs,
Fait faire explosion à l’esprit des penseurs.
Je: vis près d’eux, veilleur intime; je combine
Le vieux houblon. de Flandre et la vigne sabine,
La franche joie attique et le rire gaulois;
L’antique insouciance. avec ses douces lois,
Paix, liberté, gaîté, bon sens, est mon breuvage;
J’en grise Erasme et Sterne, et même mon sauvage,
Diderot; et j’en fais couler quelques filets
De la coupe d’Horace au broc de Rabelais.
Il poursuivit:
-Je crie à quiconque commence,
-Assez. -Finis. -Je suis le Médiocre immense.
Toutes les fois qu’on parle et qu’on dit: -Mitoyen,
Mode, médiateur, méridien, moyen,
Par chacun de ces mots on m’évoque, on m’adjure,
Et tantôt c’est louange, et tantôt c’est injure.
Je suis l’esprit Milieu; l’être. neutre qui va
Bas sans trouver Iblis, haut sans voir Jéhovah;
Dans le nombre, je suis Multitude; dans l’être,
Borne. Je m’oppose, homme, a l’excès de connaître,
De chercher, de trouver, d’errer, d’aller au bout;
Je suis Tous, l’ennemi mystérieux de Tout.
Je suis la loi d’arrêt, d’enceinte, de ceinture
Et d’horizon, qui sort de toute la nature;
L’éther irrespirable et bleu sur la hauteur,
Dans le gouffre implacable et sourd, la pesanteur.
C’est moi qui dis: -Voici ta sphère. Attends. Arrête.
Tout être a sa frontière, homme. ou pierre, ange ou bête,
Et doit, sans dilater sa forme d’aujourd’hui,
Subir le noeud des lois qui se croisent en lui.
Je me nomme Limite et je me nomme Centre.
Je garde tous les seuils. de tous les mondes. Rentre.
Tout est par moi, saisi, pris, circonscrit, dompté.
Je me défie, ayant peur de l’extrémité,
De la folie un peu, beaucoup de la sagesse.
Je tiens l’enthousiasme et l’appétit en laisse;
Pour qu’il aille au réel sans s’écarter du bien,
J’attelle au genre humain ce lion et ce chien;
Et, comme je suis souffle et poids, nul ne m’évite,
Car tout, comme esprit, flotte, et, comme corps, gravite.
Et l’explication, je te. l’ai dit, vivant,
C’est que je suis l’esprit matériel, le vent;
Et je suis la matière impalpable, la force.
Je contrains toute sève à rester sous l’écorce;
Et tout piège miroir par mon souffle est terni.
Contre l’enivrement du sinistre infini
Je garde les penseurs, ces pauvres mouches frêles.
Je tiens les pieds de ceux dont l’azur prend les ailes.
Je suis parfum, poison, bien, mal, silence, bruit.
Je suis en haut midi, je suis en bas minuit;
Je vais, je viens; je suis l’alternative sombre;
Je suis l’heure qui fait sortir en frappant l’ombre,
Douze apôtres le jour, la nuit douze césars.
Du beau donnant sa forme au grand, je fais les arts.
Dans les milieux humains, dans les brumes charnelles,
J’erre en voyant; je suis le troupeau des prunelles.
Je suis l’universel, je suis le partiel.
Je nais de la vapeur ainsi que l’eau du ciel,
Et j’éclos du rocher comme le saxifrage.
Je sors du sentier vert, du foyer, du naufrage,
Du pavé du chemin, de la borne du champ,
Des haillons du noyé sur la grève séchant,
Du flambeau qui s’éteint, de la fleur qui se fane
Je me suis appelé Pyrrhon, Aristophane,
Démocrite, Aristote, Esope, Lucien,
Diogène, Timon, Plaute, Pline l’ancien,
Cervantes, Bacon, Swift, Locke, Rousseau, Voltaire.
Je suis la résultante énorme de la terre.
La raison: J’étais là, pensif, troublé, muet;
Pendant que j’écoutais, l’être continuait:
-Homme, à nous le mystère est ouvert. Nous en sommes.
Pour l’abîme, je suis un spectre; pour vous, hommes,
Je suis la Voix qui dit: allez, mais sachez où.
J’erre près du néant le long du garde-fou.
J’avertis.
Il reprit:
-Écoute, esprit qui trembles;
Et qui ne peux pas même entrevoir les ensembles:
Hommes, vous m’ignorez, mais je vous connais tous;
Et je suis encor vous, même en dehors de vous.
Entre les brutes, foule, et les anges, élite,
Il est sur chaque terre et chaque satellite,
Un être à part; pensée et chair matière esprit;
Page mixte du livre où la nature écrit,
Dernier feuillet du Monstre et premier du Génie;
Créature où la fange et l’or font l’harmonie,
Dans la bête à moitié, dans l’idée à demi,
Flamme accouplée avec le corps son ennemi,
Double rayon tordu d’ombre et d’aube ravie,.
Mystère; ayant un pied, dans l’échelle de vie,
Sur une fin, un pied sur un commencement;
Cet être comparant, sentant, voyant, aimant,
C’est l’homme. Que la mort conserve, accroisse ou fauche
Cet à peu près sublime et ce chef-d’oeuvre ébauche,
Qu’il ait ce qu’il appelle une âme, en ce moment
Je ne t’en parle pas, je te dis seulement
Que partout l’homme existe, étant un milieu d’êtres.
Il vit près des soleils, foyers, astres ancêtres.
Sur des terres qui sont plus ou moins loin du feu,
Il vit, domptant son globe; il est grand, il est peu;
Par la forme divers, mais un par sa nature;
Il a l’hydre animal et plante pour ceinture;
Il est sur le sommet de son visible à lui;
Et, larve ou deux lueurs se croisent, point d’appui
De tout un phénomène, identique à lui-même,
Marque partout le même étage du problème;
Entre l’aile, et le ventre il est l’être debout;
Il est partout le roi planétaire; partout
Il possède et régit l’astre -intermédiaire
Entre l’ombre et le grand soleil incendiaire.
Car tout globe qui tourne autour d’une clarté
Est planète de loin, de près humanité.
Or, -puisque jusqu’a moi. ton oeil plonge et pénètre,
C’est moi qui suis l’esprit collectif de cet être,
Partout; sous toute forme, et dans l’immensité.
Tu n’es qu’homme, ô passant; je suis humanité.
L’être effrayant, planant dans l’ombre inaccessible,
Ajouta: .
-Nul ne doit sortir de son possible.
Nul ne doit transgresser son réel. Cependant
Je veux, puisque tu viens dans cette ombre, imprudent,
Faire une exception pour toi que je rencontre.
Quel que soit ton dessein, va! je n’irai pas contre;
Homme, je consens même a contenter tes voeux.
Etant de l’infini, je peux e que je veux;
Ma main peut ouvrir tout puisqu’elle peut tout clore;
Qui puise de, la nuit peut puiser de l’aurore,
Et ce que tu voudras, je te l’accorderai.
Que demandes-tu? parle.
Et dans l’effroi sacré
Je me taisais; roseau ployant, vil brin de chaume.
-Tu n’es pas jusqu’ici venu, dit le fantôme,
Pour ne pas demander quelque chose. Voyons,
Parle. Veux-tu des feux, des nimbes, des rayons?
Que veux-tu de ce gouffre où, lorsque je me penche,
La colombe nuée accourt, farouche et blanche?
Veux-tu savoir le fond du serpent, ou du ver?
Veux-tu que je t’emporte avec moi dans l’éther?
Je t’obéirai. Parle. Ou faut-il qu’on te montre
Comment l’aurore arrive, et vient à la rencontre
Du parfum de la fleur et du chant des oiseaux?
Veux-tu que nous prenions la tempête aux naseaux,
Et que nous nous roulions tous deux dans la tourmente,
Quand la meute du vent court sur l’onde écumante
Et quand l’archer tonnerre et le chasseur éclair
Percent de traits la peau d’écailles de la mer?
Veux-tu qu’à pleines mains, tous deux, dans l’invisible,
O passant, nous puisions l’illusion terrible?
Veux-tu que nous penchions nos yeux sur les secrets,
Et que nous regardions la nature de près
Pendant qu’elle produit dans l’immense pénombre?
Parle. Es-tu curieux de l’accouchement sombre?
Veux-tu voir dans le germe, et voir comment éclôt
Le songe ou le rocher, le sommeil ou le flot,
Et prendre sur le fait la création, mère
De la réalité comme-de la chimère?
Veux-tu d’une naissance entendre la rumeur,
Regarder un éden poindre, avoir la primeur
D’une sphère, d’un globe en fleur, d’une lumière?
Ou voir surgir l’idée, éblouissante, fière,
Cherchant l’époux Génie au fond du ciel lointain?
Dis, veux-tu dans la nuit,. veux-tu dans le destin-
Voir quelque lever d’astre ou quelque lever d’âme?
Tu peux choisir. Demande, interroge, réclame;
Parle. J’attends. Faut-il ressaisir, je le puis,
Une étoile aux cheveux dans la fuite des nuits,
Et te la rapporter splendide et frémissante?
Que veux-tu? Veux-tu voir dix soleils, vingt, soixante,
Se lever à la fois dans soixante univers?
Veux-tu voir, sur le seuil des cieux tout grands ouverts,
Le matin. dételant les sept chevaux de l’Ourse-?
Ou veux-tu que, dans l’ombre où le jour a sa source,
Homme, pour te donner le temps d’examiner,
Les mondes, qu’un prodige éternel fait tourner,
S’arrêtent un moment et reprennent haleine?
Parle.
L’esprit baissa ses ailes de phalène,
Et se tut. L’air tremblait sous mes pieds hasardeux.
Et l’âpre obscurité qui nous voyait tous deux
Et s’étoilait au loin de vagues auréoles,
Put entendre ce sombre échange de paroles.
Entre l’esprit étrange et moi, l’homme ébloui:
-Non, rien de tout cela -Que, demandes-tu? -LUI.
Tout sembla devant moi se fermer; et l’espèce
De clarté qui tremblait dans la nuée épaisse
Sombra dans l’air plus noir qu’un ciel cimmérien.
J’entendis un éclat de rire, et ne vis rien.
Hélas! n’étant qu’un homme, une chair misérable,
Dans cette obscurité fauve, âpre, inexorable,
Dans ces brumes sans jour; sans bords; sous ce linceul,
Je songeai qu’il était horrible d’être seul.
Puis mon esprit revint à son but: -voir, connaître,
Savoir; pendant que l’ombre informe, louche, traître,
Roulant dans ses échos l’affreux rire moqueur,
Grandissait dans l’espace ainsi que dans mon coeur.
Et je criai, ployant mes ailes déjà lasses
-Dites-moi seulement son nom, tristes espaces,
Pour que je le répète à jamais dans la nuit!.
Et je n’entendis rien que la bise qui fuit.
Alors il me sembla qu’en un sombre mirage,
Comme des tourbillons que chasse un vent d’orage,
Je voyais devant moi pêle-mêle passer
Et croître et frissonner. et fuir et s’effacer
Ces cryptes du vertige et ces villes du rêve,
Rome sur ses frontons changeant en croix son glaive,
Thèbes, Jérusalem, Mecque, Médine, Hébron.;
Des figures tenant à la main un clairon,
Et des arbres, hagards, des cavernes, des baumes
Où priaient, barbe au vent, de lugubres Jérômes,
Et, parmi des Babels, des tours, des temples grecs,
D’horribles fronts d’écueils aux cheveux de varechs
Et tout cela, Ninive, Éphèse, Delphe, Abdère, .
Tombeau de saint Grégoire où veille un lampadaire,
Marches de Bénarès, pagodes de Ceylan, .
Monts d’où l’aigle de mer le soir prend son élan,
Minarets, parthénons, wigwams, temple d’Aglaure
Où l’on voit l’aube, fleur vertigineuse, éclore,
Et grotte de Calvin, et chambre de Luther,
Passages d’anges bleus dans le liquide éther,
Trépieds où flamboyaient, des âmes, yeux de braise
:
De la chienne Scylla sur la mer calabraise,
Dodone, Horeb, rochers effarés, bois troublants,
Couvent d’Eschmiadzin aux. quatre clochers blancs,
Noir cromlech de Bretagne, affreux cruach d’Irlande,
Poestum où les rosiers suspendent leur guirlande,
Temples des fils de Cham, temples des fils de Seth,
Tout lentement flottait et s’évanouissait
Dans une sorte d’âpre et vague perspective;
Et ce n’était; devant ma prunelle attentive,
Que de la vision qui ne fait pas de bruit,
Et de la forme obscure éparse dans la nuit.
Et, pâle, en moi, tout bas, je fis cet appel sombre,
Sans oser élever la voix, de peur de l’ombre:’
Êtres! lieux! choses! nuit! nuit froide qui te tais!
Cèdres de Salomon, chênes de Teutatès;
^ plongeurs de nuée, ô rapporteurs de tables;
Devins, mages, voyants, hommes épouvantables;
Thébaïdes, forêts, solitudes; Ombos
Où les docteurs, vivant dans des creux de tombeaux,
S’emplissent d’inconnu comme d’eau les éponges;
^ croisements obscurs des gouffres et des songes,
Sommeil, blanc soupirail des apparitions;
Germes, avatars, nuit des transformations
Où l’archange s’envole, où le monstre se vautre;
Mort, noir pont naturel entre une étoile et l’autre,
Communication entre l’homme et le ciel;
Colosse de Minerve aptère, aux pieds duquel
Le vent respectueux fait tomber ceux qui passent’;
Flots revenant toujours que les rocs toujours chassent;
Chauve Apollonius, vieux rêveur sidéral;
^ scribes, qui, du bout du bâton augural
Tracez de l’alphabet les ténébreux jambages;
Époptes grecs fakirs, voghis, bonzes, eubages,
^ tours d’où se jetaient les circumcellions;
Sanctuaires; trépieds, autels, fosse aux lions;
Vous qui voyez suer les fronts pâles des sages,
Cimetières, repos, asiles, noirs passages
Où viennent s’essuyer les penseurs, ces vaincus;
Monstrueux caveau peint du roi Psamméticus;
François d’Assises, Scot, Bruno, sainte Rhipsime
^ marcheurs attirés aux clartés de la cime;
Sept sages qui parlez dans l’ombre à Cyrselus ;
Du rêve et du-désert redoutables reclus’
Qui chuchotez avec les bouches invisibles;
Fronts courbés sous les cieux d’ou descendent les bibles;
Spectres; effarements de lampe et de flambeau;
Toi -qui vois Chanaan; montagne de, Nébo;
Moines du mont Athos, chantant de sombres proses’;
Libellules d’Asie errant dans les jamroses ;
Isthme de Suez fermant l’Inde comme un verrou;
Ô voûtes d’Ellora, croupes du mont Mérou
D’où s’échappe le Gange. aux grandes eaux sacrées;
Ombre, qui n’as pas l’air de savoir que tu crées;
^ vous qui criez: deuil! vous qui criez: espoir!
Spherus qui, toujours seul dans l’antre toujours noir,
Cherches Dieu -par les mille ouvertures funèbres,
Blanches, tristes, que font à l’âme les ténèbres;
Prêtres qu’en votre nuit suit le doute importun;
Vous, psalmistes, David, Éthan, grave Idithun ;
Jean, interlocuteur de l’oiseau chéroubime ;
Et vous, poetes; Dante, homme. effrayant d’abîme,
Grand front tragique ombré de feuilles de laurier,
Qui t’en reviens, laissant l’obscurité crier,
Rapportant sous tes cils la lueur des avernes;
Dompteurs qui sans pâlir allez dans les cavernes
Chercher le hurlement jusque dans son chenil;
Pilotes nubiens qui remontez le Nil;
^ prodigieux cerf aux rameaux noirs qui brames
Dans la forêt des djinns, des pandits et des brames;
Hommes enterrés vifs, songeant dans vos cercueils;
^ pâtres accoudés; ô bruyères; écueils
Où rêve au crépuscule une forme sinistre;
Pythie assise au front du hideux cap Canistre;
Angles mystérieux où les songeurs entrés
Distinguent vaguement des satrapes mitrés;
Vous que la lune enivre et trouble, sélénites ;
Vous, bénitiers sanglants des seules eaux bénites,
Yeux en pleurs des martyrs; vous, savants indécis;
Merlin, sous l’escarboucle inexprimable assis;
Toi, Job, qui te plains; toi, Basile, qui médites;
Est-ce qu’on ne peut pas voir un peu de jour, dites?
Et, sombre, j’attendis; puis je continuai:
-Quoi! l’homme tomberait, hagard, exténué,
Comme le moucheron qui bat la vitre blême!
Quoi! tout aboutirait a du néant suprême!
Tout l’effort des chercheurs frémissants se perdrait!
L’homme habiterait l’ombre et serait au secret!
Marcher serait errer! l’aile serait punie!
L’aurore, ô cieux profonds, serait une ironie!
Alors, tout haut; levant la voix, levant les bras,
Éperdu, je criai: -Cela ne se peut pas!
Grand inconnu! méchant ou bon! grand invisible!
Je te le dis en face, Être! c’est impossible!
On éclata de rire une seconde fois…
Et ce rire était plus un rictus qu’une voix;
Il remua longtemps l’ombre visionnaire,
Et, s’évanouissant, roula comme un tonnerre
Dans ce prodigieux silence où le néant
Semblait vivre, insondable, immobile et béant.
Ô méditations! oh! comme l’esprit souffre
Sous les porches hagards et difformes du gouffre!
Comme le souffle noir du vide vous-poursuit,
Sinistre, en vous jetant du trouble et de la nuit!
Comme on sent que le rêve est un être qui vole
Et passe… -On m’adressait dans l’ombre la parole;
Et de funèbres voix que sur mon front j’avais
Comme les endormis en ont à leurs chevets,
Chuchotaient au-dessus de moi des choses sombres.
Je sentais la terreur muette des décombres
Et je me demandais: -Qui donc murmure ainsi?
C’était, dans le ciel morne et de brume épaissi,
Comme un nuage obscur de bouches sur ma téte;
Des faces me parlaient dans un vent de tempête;
Puis ces voix s’éteignaient comme le vague son
Qui n’est plus la parole et devient le frisson.
Noirs discours! l’ironie y grinçait dans le râle;
Des plaintes, sanglotant dans l’ombre sépulcrale
Comme entre les roseaux gémit le gavial,
S’achevaient en sarcasme amer et trivial;
Je croyais par moments qu’en ces vagues royaumes
J’assistais au concile effrayant des fantômes
Que nous nommons raison, logique, utilité,
Certitude, calcul, sagesse, vérité;
Il me semblait, parmi le grand murmure austère
De l’horreur, de la nuit, du tombeau, du mystère,
Entendre Aristophane; et voir, après les pleurs,
Toutes sortes d’éclairs cyniques et railleurs,
Moqueurs, étincelants, percer l’ombre ennemie,
Et Rabelais passer à travers Jérémie;
J’écoutais frémissant et par moments vaincu.
Était-ce des esprits d’hommes ayant vécu:?
Était-ce les conseils qui flottent dans les nues
Pour quiconque s’égare aux routes inconnues?
Mon front sous l’infini ployait lugubrement.
L’espace affreux, éther, ténèbres, firmament,
Espèce de taillis sans branches étoilées,
Où les brouillards fuyaient en confuses mêlées,
Semblait d’une forêt le redoutable dais….
Qu’était-ce que ces voix? je ne sais.-J’entendais.
Et ma raison. tremblait en moi, diminuée,
Dans des tressaillements d’orage et de nuée.
Cependant par degrés l’ombre devint visible;
Et l’être qui m’avait parlé précédemment
Reparut, mais grandi jusqu’à l’effarement;
Il remplissait du. haut en bas le sombre. dôme
Comme si l’infini dilatait ce fantôme;
De sorte que. l’esprit effrayant n’offrait plus
Que des faces roulant par flux et par reflux,
Un sourd fourmillement d’hydres, d’hommes, de bêtes,
Et que le fond du ciel me semblait plein de têtes.
Ces têtes par. moments semblaient se quereller.
Je voyais tous ces yeux dans l’ombre étinceler.
Le monstre grandissait en silence, sans cesse.
Et je ne savais plus. ce que c’était. Était-ce
Une montagne, une hydre, un gouffre, une cité,
Un nuage, un amas d’ombre,. l’immensité?
Je sentais tous ces yeux sur moi fixés ensemble.
Tout à coup, frissonnant comme un arbre qui tremble,
Le fantôme géant se répandit en-voix,
Qui sous ses flancs confus murmuraient a la fois;
Et, comme d’un brasier tombent des étincelles,
Comme on voit des oiseaux épars, pigeons, sarcelles,
D’un grand essaim passant s’écarter quelquefois,
Comme un vert tourbillon de feuilles sort d’un bois,
Comme, dans les hauteurs par les vents remuées,
En avant d’un orage il vole des nuées,
Toutes ces voix, mêlant le cri, l’appel, le chant,
De l’immense être informe et noir se détachant,
Me montrant vaguement des masques et des bouches,
Vinrent sur moi bruire avec des bruits farouches,
Parfois en même temps et souvent tour à tour,
Comme des monts, à l’heure où se lève le jour,
L’un après l’autre, au fond de l’horizon s’éclairent
Et des formes, sortant du monstre, me parlèrent:
[I]
UNE VOIX
Les rudes bûcherons sont venus dans le bois.
-Si tu ne vois pas nie et doute si tu vois,
A dit Cratès. -Zénon Gorgias, Pythagore,
Plaute et Sénèque ont dit: -Si tu vois, nie encore.
Bacon a dit -Voici l’objet, l’être, le corps,
Le fait. N’en sortez pas; car tout tremble dehors.
-Quel est ce monde? a dit Thalès. Apollodore
A dit: C’est de la nuit que de la cendre adore.
Et Démonax de Chypre, Epicharme de Cos,
Pyrrhon, le grand errant des monts et des échos,
Ont répondu: -Tout est fantôme. Pas de type.
Tout est larve. -Et fumée, a repris Aristippe.
– Rêve! a dit Sergius, le fatal syrien.
– Rencontre de l’atome et de l’atome, et rien.
Ces mots noirs ont été jetés par Démocrite.
Ésope a dit: -A bas, monde! masque hypocrite!
Épicure qui naît au mois Gamélion,
Et Job qui parle au ver, Dan qui parle au lion,
Amos et Jean troublés par les apocalypses,
Ont dit: -On ne le voit qu’à travers les éclipses.
– L’être est le premier texte et l’homme est le second.
Lisible dans la fleur et dans l’arbre fécond,
Et dans le calme éther des cieux que rien n’irrite,
La nature est dans l’homme obscure et mal transcrite.
Voilà ce qu’Alchindé l’arabe a proclamé.
Cardan a dit: -Hélas! c’est fermé, c’est fermé!
Alcidamas a dit: -Miracle, autel, croyance,
Dogme, religion, fondent sous la science
Dieu sous l’esprit humain, tas de neige au dégel.
Et Goethe au vaste front, Montaigne, Fichte, Hégel,
Se sont penchés pendant que le grand rieur maître,
Rabelais, chuchotait sur l’abîme Peut-être.
Diogène a crié: -Des flambeaux! des flambeaux!
Shakspeare a murmuré, courbé sur les tombeaux:
– Fossoyeur, combien Dieu pèse-t-il dans ta pelle?
Et Jean-Paul a repris: -Ce qu’ainsi l’homme appelle,
C’est la vague lueur qui tremble sur le sort;
C’est la phosphorescence impalpable qui sort
De l’incommensurable et lugubre matière;
Dieu, c’est le feu follet du monde cimetière.
Dante a levé les bras en s’écriant: Pourquoi?
– O nuit, j’attends que tout s’affirme et dise: moi.
Quel est le sens des mots: foi, conscience humaine,
Raison, devoir? a dit le pâle Anaximène.
Locke a dit: -On voit mal avec ces appareils.
Reuchlin a demandé: -Qu’est-ce que les soleils?
Sont-ce des piloris ou des apothéoses?
Lucrèce a dit: -Quelle est la nature des choses?
Il a dit: Tout est sourd, faux, muet, décevant.
Sous cette immense mort quelqu’un est-il vivant?
Sent-on une âme au fond de la substance, et l’être
N’est-il pas tout entier dans ce mot: apparaître?
L’ombre engendre la nuit. De quoi l’homme est-il sûr?
Et le ciel, le hasard, l’obscurité, l’azur,
Le mystère, et la vie, et la tombe indignée
Retentissent encor de ces coups de cognée.
Oui, les douteurs; les fiers incrédules, les forts,
Ont appelé Quelqu’un, quoique restés dehors;
Ils ont bravé l’odeur que le sépulcre exhale;.
Le front haut, ils disaient à l’ombre colossale:
-Ose donc nous montrer ton Dieu, que nous voyions
Ce qu’il a de carreaux, ce qu’il a de rayons,
Gouffre horrible, et si c’est avec de la colère
Ou du pardon divin que son visage éclaire!
Et, prêts à tout subir, sans peur, prêts à tout voir,
Calmes, ils regardaient en face le ciel noir,
Et le sourd firmament que l’obscurité. voile,
Farouches, attendant quelque chute d’étoile!
Certes, ces curieux, ces hardis ignorants,
Ces lutteurs, ces esprits, ces hommes étaient grands,
Et c’étaient des penseurs à l’âme fiers. et fière
Qui jetaient à la nuit ce défi de lumière.
Chercheur, trôuveras-tu ce qu’ils n’ont pas trouvé?.
Songeur, rêveras-tu plus loin qu’ils n’ont rêvé?
[II]
UNE AUTRE VOIX
Ne nous demande pas, ô songeur, qui nous sommes.
S’ils nous entrevoyaient, nous ferions peur aux hommes.
Soit en bien, soit en mal, nous avons conseillé
Quiconque a médité, cherché, pensé, veillé, –
Tous les grands insensés, tous les sages célèbres:
Nous volons d’arbre en arbre aux forêts de ténèbres;
Tout ce que l’homme appelle Énigme, Doute, Mort,
Brume, Silence, Effroi, Hasard, Mystère, Sort,
Est pour nous, sous l’horreur des voûtes éternelles,
Comme un taillis obscur par où passent nos ailes;
Nous sommes les flottants de l’immense azur noir;
Si quelque mage osait essayer de nous voir,
De saisir un de nous, * de compter notre nombre,
Nous nous dissiperions comme des oiseaux d’ombre.
C’est nous que vous nommez démons; homme, tu sens
Sous des souffles confus tes cheveux frémissants,
C’est nous. Nous versons l’ombre aux jours que tu consommes;
Nous jetons des lueurs dans ton-sommeil. Nous sommes
Pris dans l’obscurité comme vous dans la chair.
Nous, sommes les passants -sinistres de l’éclair,
Les méduses du rêve aux robes dénouées,
Les visages d’abîme épars dans les nuées.
Tout ce que vous voyez, nous ne le voyons pas.
Nous ne distinguons point votre terre, vos pas,
Vos faces, d’un soleil invisible inondées,
Mais dans votre cerveau nous voyons vos idées;
Votre pensée est nue à nos regards moqueurs;
Nous voyons le dedans vertigineux des coeurs.
L’haleine de la nuit nous chasse et nous oublie,
Et fait flotter le fil mystérieux qui lie
Vos sciences, vos plans, vos travaux, vos desseins,
Vos efforts, vos projets, vos voeux, à nos essaims.
Nous mêlons notre nuit avec votre ignorance;
Vous appelez cela savoir. La transparence
De l’Être parfois laisse apercevoir nos fronts.
Parfois jusqu’à vos coeurs, la nuit, nous pénétrons,
En rêve, et vous sentez comme une vague étreinte.
Sans cesse des courants d’espérance ou de crainte,
Des flux et des reflux de sentiments divers
Vont, dans les profondeurs de l’espace, à travers
Le vide, l’aquilon, le tombeau, le décombre,
De vous le peuple aveugle à nous le peuple sombre.
L’Inconnu nous tient tous. dans ses mornes filets.
Nous sommes vos échos, vous êtes nos reflets;
Car tout est l’unité. Forme joyeuse ou triste,
Tout se confond dans Tout, et rien à part n’existe,
O vivant! Et sais-tu ce que dit l’abîme? UN.
Sans que vous le sachiez, nous pensons en commun;
Nous tremblons au-dessus de vous, livide armée;
Et de votre feu noir nous sommes la fumée.
Nos formes de la nuit sont le lugubre jeu
Nous allons, nous flottons. -Et toi, tu cherches Dieu?
Hélas!
Qui que tu sois, redoute, au gouffre où tu te plonges,
Le vague coudoiement des vains passants des songes.
-Fuyez d’ici, vivants, dont l’esprit, fléchissant
Sous l’incompréhensible et sous l’éblouissant,
Peut à peine porter le poids d’un évangile.
Ce n’est pas sans danger que des hommes d’argile,
Tremblants quand ils sont las, glacés quand ils sont nus,
Dialoguent dans l’ombre avec des inconnus.
À force de songer, ô pâle solitaire,
Tu sentiras de l’air sous toi; tu perdras terre…
Oh! les souffles! craignez les souffles de la nuit!
Où vous emportent-ils? Ceux qu’un rêve conduit
Deviennent rêve eux-mêmes, et, sans. être coupables,
Tombent dans l’essaim noir des faces impalpables.
C’est alors qu’éperdu, terrible, iu tendras
Les mains comme les morts sous leurs lugubres draps.
Mais à quoi bon? Tout fuit. Un vent qui vous pénètre
Vous roule dans l’espace à jamais… -O deuil! être
Des espèces d’esprits misérables chassés!
Oh! n’entendre jamais ce mot céleste: assez!
Un souffle vous apporte, un souffle vous remmène..
On a, sur ce qu’on garde encor de forme humaine,
D’obscurs attouchements et des passages froids;
Toute l’ombre n’est plus qu’une suite d’effrois;
On sent les longs frissons. des roseaux de l’abîme.
Jamais le jour. -Jamais un rayon qui ranime.
Errer! errer! errer! errer! faire des noe uds
D’ombre, dans l’invisible et le vertigineux!
Monter, tomber, monter, retomber! sort terrible!
Être à jamais l’informe égaré dans l’horrible,
Le contraire du jour, de l’hymne et de l’encens,!
Des témoins de l’énigme, à jamais frémissants
Devant le ténébreux, devant l’inabordable,
Et face à face avec un voile formidable!
Être, en dehors de l’être, en dehors du trépas,
Quelque chose d’affreux qui souffre et ne vit pas!
Être de la clameur dans l’infini semée,
Un vague tourbillon pleurant, une fumée
De larves, de regards, de masques, de rumeurs,
De voix ne pouvant pas même dire: je meurs,
Passant toujours, toujours, toujours, comme un flot sombre,
Sous les arches sans fin du hideux pont de l’ombre!
[IV]
UNE AUTRE VOIX
Malheur au curieux lugubre, -qui s’acharne
A la vertigineuse et sinistre lucarne!
Malheur aux imprudents penchés, sur l’absolu!
Pour avoir trop sondé, pour avoir trop voulu,
Pour s’être trop plongés dans l’abstraction triste
Où rien de saisissable et d’humain ne persiste,
C’est fini; les voilà sur les fatals sommets,
Égarés en dehors de l’homme désormais,
Sortis du bien, du mal, de l’orgueil, de l’envie,
De l’amour, de la haine, et plus grands que la vie!
Leur esprit, emporté loin de vous, ô viyants,
Prend, dans la vision des gouffres décevants,
Dans on ne sait quoi d’âpre et d’horrible et d’immense,
Cette divinité que. vou nommez démence.
Ils ne sont plus jamais éveillés ni dormants.
Terrestre et claire encor dans ses commencements,
Leur pensée, obscurcie en grandissant, achève
D’ouvrir ses vagues yeux dans le monde du rêve.
Oh! monde redoutable! oh! ce que nous voyons!
Des échelles d’esprits dans de pâles rayons;
Les flamboiements, les feux, les cratères, les soufres,
Les éclairs, gouvernés par les anges des gouffres;
Des sons de voix qu’on a dans la joie entendus;
D’affreux escarpements dans des mondes perdus;
Des astres, dans des mains portés comme des lampes;
Et là-bas, dans la nue aux tortueuses rampes,
Errent ceux qui vivaient et ne sont plus; ils vont,
Tous ces crânes à l’oeil monstrueux et profond,
Tous ces squelettes blancs venus des ossuaires;
Ils vont, tous ces linceuls, tous ces hideux suaires,
Tous ces draps frissonnants, foule effrayante à voir,
Et, chassant devant lui, dans l’affreux chemin noir,
Leur conscience nue et leur âme sans voiles,
L’ange fouette les morts avec son fouet d’étoiles.
Et l’on voit des lueurs, on entend des appels;
Les constellations, flamboyants archipels,
Brillent au zénith sombre, et le chaos conspue
Le ciel avec son eau sinistre et corrompue.
Et les désespérés passent. Qui donc sont-ils?
Sont-ce des esprits morts? Sont-ce des corps subtils?
Ils tombent on ne sait de quelle obscure cime,
Tantôt plus noirs, tantôt moins sombres que l’abîme;
Leur chute flotte au gré de l’air qui les poursuit;
Ils seraient les flocons, s’il neigeait de la nuit.
Qu’est-ce que ce nuage inconcevable d’êtres,
Phalènes se heurtant à de vagues fenêtres?
Les uns n’ont qu’un regard et sont comme les yeux
De l’infini glacé, sourd et silencieux;
D’autres vont droits et blancs dans la profondeur blême;
D’autres, plus effrayants que. les ténèbres même,
Luttent contre la nuit dans les horreurs du vent,
Poussant des cris, mordant l’ombre, n’apercevant
Que la lividité des mornes étendues,
Ne distinguant qu’un flot de formes éperdues,
Et que ce qu’on peut voir de nuée et de cieux.
Dans des renversements de torses furieux.
Et ces larves s’en vont. Est-on sûr qu’elles soient?
Et les contemplateurs sont la. Tristes, ils voient.
Quoi? l’inconnu, muré dans sa muette loi.
Et qui dira jamais ce qu’expriment d’effroi
Ces profils ténébreux, ces postures fatales,
Ces yeux hagards noyés dans des aurores pâles?
Ils pensent, échoués dans l’immobilité;
La terreur sans espoir fait leur tranquillité;
Leur épaule fléchit comme s’ils portaient toute
La charpente du monde avec toute la voûte;
Et, comme en un caveau, goutte à goutte, la nuit
Filtre sous leur front blême où leur oeil fixe luit.
Ils ont pour vision éternelle la Chose
Sans nom, sans jour, sans bruit, sans bord, sans fin, sans cause,
Jamais ne s’arrêtant, jamais ne s’achevant,
Terrible, avec des vols de spectres dans e vent.
Que viens-tu demander à e monde nocturne?
Un Dieu!Pourquoi viens-tu plonger ta main dans l’Urne?
Job en. tire Satan et Mahomet Iblis.
Les gouffres ont-ils Dieu dans leurs profonds oublis?
Ce Dieu sert-il de centre à leurs. circonférences?
Le voit-on à travers leurs sombres transparences?
Ou bien est-ce ce Tout, cette âpre immensité,.
Ce ciel, que vous, prenez pour une volonté?
Sont-ce ces profondeurs, ces vents, ces fondrières,
Ces forêts de nuée aux livides clairières,
.
Ces éléments, ces nuits, ces mornes régions,
Que vous appelez Dieu dans vos religions?
Avez-vous pour mirage, ô fils du cimetière,..
De voir la chose-Dieu sous la chose Matière?
Est-ce Dieu qui paraît,. quand s’enfuit;l’alcyon;
Quand l’hydre. de l’écume entre en convulsion;
Quand. partout on entend dans la sombre nature
Comme un bruit d’ouragan brisant une mâture,
Quand le ciel lamentable éclate en tristes voix;
Quand le nuage accourt’.; quand les bêtes » des bois
Tremblent; quand les lions, hagards, baissent-la tête
Sous des écrasements d’éclairs et de tempête?
Est-ce lui que la mer appelle en sa clameur?
Homme, est-il quelque part un effrayant semeur
Qui jette dans l’azur des chiffres et des nombres,
De la graine d’abîme éclose en larves sombres,
Des vivants comme nous qui te semblent des morts,
Des esprits comme toi qui nous semblent des corps,
Et qui voit, dans le champ des espaces sonores,
Ondoyer des épis d’étoiles et d’aurores?
Qui peut répondre oui? qui peut répondre non?
Un geôlier rôde-t-il autour du cabanon?
Qu’importe! Vis. Tais-toi. Va-t’en. Aime ton père,
Ta mère et tes enfants. Qui cherche désespère.
[V]
UNE AUTRE VOIX
Ah! c’est l’obscurité, c’est la source profonde
Que ton oeil veut scruter, que veut fouiller ta sonde,
O songeur dont la nuit hérisse les cheveux!
Ah! c’est l’énigme Dieu qui t’occupe! Tu veux
Aller au fond! tu veux voir clair dans la nuée!
Vider l’ombre! Il te faut, pauvre âme exténuée,
Cette science-là… -Voyons: tente; entreprends;
Avec les papyrus, les missels, les korans,
Les bibles que les sphynx portaient sur leurs poitrines,
Rebâtis la charpente informe des doctrines;
Des croyances de l’homme écrasé sous le faix,
Echafaude l’amas monstrueux, et refais
Un édifice avec ces poutres mal unies
Qu’on nomme vérités, dogmes, théogonies;
Restaure, démolis, fonde. Fais des essais.
Remets le vieux bahut debout sur ses vieux ais;
Crois comme Jean Climaque et Jean Catéchumène;
Ou taille un meuble neuf dans la science humaine
Pour y mettre sous clef l’ombre et l’éternité.
Questionne l’autel d’Isis ou d’Astarté,
Ou les temples payens, peu salués des sages,
Ayant de noirs corbeaux nichés dans leurs bossages,
Ou le blême Irmensul debout dans le menhir;
Creuse dans le passé, creuse dans l’avenir;
Regarde fixement le Temps noir qui feuillette
L’homme et la vie avec son pouce de squelette;
Épèle l’univers que le souffle créa,
Texte dont chaque monde est un alinéa;
Chiffre et déchiffre; éprouve, interprète, proclame;
Confronte ce que l’homme a d’ombre dans son âme
Avec ce que le ciel a d’âme dans sa nuit
Relance Olympe ermite au fond de son réduit;
Interroge le ver sur la toile qu’il file;
Montre et vois; fais la pâque ainsi que Théophile
Le quatorzième jour de la lune de mars;
Visite Ammon ; tiens tête aux colosses camards
Conteste, affirme; nie, attends; dis ton rosaire;
Sens la terre trembler -sous toi comme Césaire;
Prêche avant d’être prêtre ainsi que Bellarmin;
Exprime en ton cerveau tout le savoir humain
Fais-toi de tout comprendre une étrange prouesse;
Vois venir au-devant l’un de l’autre Boèce
Et saint-Denis, chacun sa tête dans sa main;
De la même façon fais le même chemin;
Hante les profondeurs dont Pythagore est pâle;
Commente nuphre, Adon, Glareanus de Bâle
Sois druide, fakir, bonze, magicien;
Installe, si tu veux; sur le modèle ancien,
Au-dessus des brouillards de l’erreur chimérique,
Une sagesse avec entablement dorique;
Sois le médiateur des aveugles Volta
Dément Clairaut; Cyrille au front du Golgotha
Voit dans l’Ombre une croix haute de quinze stades
Bossuet de Calvin tance les incartades;
L’évêque Archelaüs poursuit l’errant Manès;
Hildebrand dit: Mol SEUL. Luther dit: HERR OMNES
Ce qu’adore Pascal Diderot le diffame;
Reuchlin dit: -Vos trois rois! conte de bonne femme!
-D’où viennent-ils? demande Arouet à Calmet ;
De l’Inde ou de l’Afrique? -Et Paracelse-met
Trois pégases de flamme aux ordres des trois mages;
Salomon-sculpte l’arche; Huss brise les images;
Pélage veut la lutte; Augustin veut la. foi.;
Interviens; crée un-centre, une règle, une loi;
Trouve l’axe commun des doctrines contraires
A force de raison rends les raisonneurs frères;
Amalgame Épicure avec Ézéchiel;
Pour ceux-ci, l’univers n’a que l’enfer pour ciel;
C’est le cachot-du mal dont vous êtes les proies;
Pour ceux-là, c’est le lieu des fêtes et des joies
Les uns vivent chantant: tout est plaisir et jeu!
D’autres lisent le livre a la lueur du feu.
Combine ce zénith et ce nadir des sages.
Fais pour ton oeil, penché sur les faits, sur les âges,
Une lentille avec tout ce que l’homme apprit;
Cherche; dis-toi: -Je vais faire dans mon esprit
Converger la clarté pour la changer en flamme,
Condenser Dieu sur moi pour allumer mon âme.
Fouille Alcuin, saint-Thomas, Gorgias Léontin,
Le ménologe grec, le rituel latin;
Va de Thèbe Heptapyle à Thèbe Hécatonpyle ;
Eblouis-toi d’énigme et d’effroi la pupile;
Ecris et lis; sois gond du portail; sois flambeau,
Sois. cardinal avec Sadolet et Bembo;
Va-t’en dans le désert manger des sauterelles
Comme Jean qui de l’ombre écoutait les querelles;
Fais une enquête; prends des informations
Près des vents, près des flots où sont les alcyons;
Cueille chaque chimere et chaque schisme; laisse
Novatus pour Eustathe, Arius pour Mélèce;
Va des juifs aux parsis, va des esprits aux corps,
De la ronde des dieux à la ronde des morts,
De la danse morphasme à la danse macabre.
Veille; allume ta lampe au sombre candélabre
Que tiennent, près du trône où Septentrion luit,
Persée et Sirius, ces nègres de la nuit.
Interpelle le germe et la endre; rédige
Un interrogatoire en forme du prodige;
Ecoute pétiller le feu dans l’encensoir;
Ecoute le cri sourd de la foudre, et, le soir,
Dans le Campo Santo le bruit que fait la pioche;
Parle à Domnus premier, évêque d’Antioche,
Et sur l’irrémissible et sur le véniel,
Consulte Cassien, Scaliger, Torniel;
Sois le voyant! pareil aux tremblants aruspices,
Va regarder la nuit l’horreur des précipices;
Au fond de tout abîme aie un sinistre aimant;
Observe, spectateur des deux gouffres, comment
L’homme entre dans la mort et l’astre dans l’éclipse;
Donne aux vierges ta plume ainsi que Juste Lipse;
Attends dans l’infini, leur morne promenoir,
Zénon, le sage fou, Gerbert, le pape noir;
Prie, évoque, bénis, sacre, exorcise, adjure;
Accoude-toi sur l’être obscur; fais la gageure
De l’énigme, du sphinx, du gouffre, de demain,
D’hier, de l’avenir! jauge, la toise en main,
Le ciel par kilomètre ou bien par centiare;
Drape-toi d’un suaire ou coiffe une tiare;
Tâte dans le cercueil l’affreux noeud gordien;
Prends-toi pour unité; fais-toi méridien;
Ajoute ta raison, ton but; ta conjecture
Et ta pensée ainsi qu’un faîte à la nature;
Mets sur cette Chéops le pyramidion;
Sois un convertisseur comme Spiridion;
Sois un avertisseur comme le coq sonore;
Monte sur le cheval terrible de Lénore,
Ayant pour t’éclairer le feu de ses naseaux,
Et la lumière qu’ont les spectres sur leurs os;
Superpose et bâtis comme une tour solide
Wiclef, Leibnitz; le diacre Ambroise, Basilide,
Swedenborg, Lyranus, Rupert, Abulensis,
Cardan, sous l’escarboucle inexprimable assis,
Photin, Cassiodore, Alcidamas, Eusèbe,
Potamon d’Héraclée et Paphnuce de Thèbe,
Tous les docteurs, vrais, faux, grands, petits, inconnus,
Connus, depuis Sophron jusqu’à Théotechnus,
Les devins, les_ savants, Paris, Rome, Épidaure,
Les poëtes sereins, ces frères de l’aurore
Faits de la même pourpre et dorés du même or,
La congrégation des pères de Saint Maur,
La grâce, le péché, l’oraison impétrante,
Les vingt-cinq sessions du concile de Trente,
.Les feuillets sibyllins tombés. on ne sait d’où,
Le livre turc, le livre hébreu, le livre indou;
Passe lés jours, les nuits; deviens blanc dans les rêves;
Sois Jérôme; oui, sois Jean rôdant le long des grèves;
Sois Dante pour penser et sois Newton pour voir;
Sois Origène, Euler, Platon! Veux-tu savoir
Ce que tu construiras sur Dieu? de la fumée.
Oui, combine, l’Égypte, et Delphe, et l’Idumée;
Cherche le sens des mots Zéus, Vichnou, Mithra;
Fouille le zodiaque obscur, de Denderah ;
Espère où Nicomaque et Thalès désespèrent;
Reprends les chiffres noirs, où d’autres se trompèrent
Reprends-les tous, reprends ceux où tu te trompas;
Tous les cercles que peut contenir ton compas,
Trace-les; songe; parle aux. arbres; fais-leur signe;
Compte, compte, recompte; additionne, aligne,
Devant l’impénétrable et devant le fatal,
Devant ce qui. n’a pas de nombre et de total,
Tous tes zéros, anneaux du rideau de la tombe.;
Le sépulcre, c’est:là que toujours on retombe,
Se dresse devant toi, regarde tes travaux,
Bons, mauvais, inexacts, exacts, anciens, nouveaux,
Et ce tas de calculs que, ta pensée anime,
Et te jette e. cri, le seul mot de l’abîme
Qu’il sache, et le seul nom. qu’il se connaisse: Après?
Question que se font dans l’ombre les cyprès.
[VI]
UNE AUTRE VOIX
Et d’abord, de quel Dieu veux-tu parler? Précise.
Quel est celui qui tient ta pensée indécise?
Dis, est-ce du Dieu peint en jaune, en rouge, en bleu;
Habitant d’un triangle où flambe un mot hébreu;
Face dorée au fond d’une nuée épaisse;
Portant couronne, étole, et glaive, et sceptre; espèce
D’empereur, habillé d’un habit de soleil,
Ayant au poing le globe et Satan sous l’orteil,
Assis dans une chaire, et dictant la sentence
D’Arius à Nicée et de Huss a Constance;
Niant le genre humain, concile universel;
Servant de majuscule aux pages du missel;
Dieu qui met Galilée en prison, et de Maistre
En sentinelle au seuil du paradis terrestre;
Dieu qu’une vieille en rêve, au bruit qu’en se choquant
Font dans l’immensité des foudres de clinquant,
Sous un grand dais d’azur que l’astre damasquine,
Aperçoit lui montrant les numéros d’un quine;
Dieu gothique, irritable, intolérant, tueur,
Noir vitrail effrayant qu’empourpre la lueur
Du bûcher qui flamboie et pétille derrière?
Est-ce du Dieu qui veut la chanson pour prière,
Qu’on invoque en trinquant, Dieu bon vivant, qui rit;
Comprend, sait que la chair est faible, a de l’esprit;
Dieu point fâcheux qui vit en bonne intelligence
Avec les passions de votre pauvre engeance,
Excusant le péché, l’expliquant au besoin,
Clignant de l’oeil avec le diable dans un coin,
Flânant, regardant l’homme en sa fainéantise,
Mais jamais du côté qui fait une sottise,
Et pas très. sûr au fond lui-même d’exister?
Est-ce du Dieu qu’on voit à Versailles monter
Aux carrosses du roi, bien né, suivant. les modes,
Rendant aux Montespans les Bossuets commodes,
Dieu de cour, Dieu de ville, avec soin expurgé
De toute humeur brutale et de tout préjugé,
Complaisant; paternel aux morales mondaines;
Avec les Massillons émoussant les Bridaines ;
Dieu qu’un fripon coudoie avec tranquillité;
Dieu par la politique et le siècle accepté;
Lâchant son ciel; disant: Paris vaut une messe;
Souple et doux, dispensant les rois de leur promesse,
Point janséniste, point pédant, point monacal;
Permettant à Sanchez d’effaroucher Pascal,
Au banquier d’encoffrer cent pour cent, à la femme,
Laide, d’être méchante, et, belle, d’être infame;
Passant l’épice au juge, au marchand le faux poids;
Habile; à Notre-Dame accouplant Quincampoix;
Sévère seulement aux têtes raisonnantes,
Tuant un peu Ramus, biffant l’édit de Nantes,
Mais qui, pourvu qu’on soit, dans les grands jours, pilier
A l’église, et qu’on soit cousin d’un marguillier,
Et qu’on veuille que Rome en tout règne et s’accroisse,
Et qu’on rende le pain bénit à sa paroisse,
Vous prend en amitié, vous soutient chaudement,
Vous épouse, travaille à votre avancement,
Parle à son excellence et vous pousse, et procure
Un grade aux fils aînés, aux cadets une cure,
En attendant la mitre ou les canonicats;
Dieu facile, logeable, aimable, utile en-cas
Qui se contente, ayant d’indulgence boutique,
D’un peu d’hypocrisie et d’un peu de pratique;
Dogme et religion des dévôts positifs
Qui font de temps en temps des voyages furtifs,
Courts, dans l’éternité, l’abîme, le mystère,
Et l’insondable, avec ce Dieu pour pied-à-terre?
Est-ce du Dieu guerrier, militaire, sanglant,
Qui s’inquiète peu. que vous mangiez du gland
Ou du pain, mais qui veut pour rites et pour cultes
Glaives, piques, corbeaux, scorpions, catapultes,
Grappin horrible où pend un vaisseau tout entier,
Tortue avec sa claie enduite de mortier,: .
Béliers fixes, heurtant les murs comme des proues,
Telenos enlevant des soldats, tours a roues
Recouvertes de-mousse-et de crin de cheval;
Plus tard, pierriers broyant quelque donjon-rival
Jusqu’à ce qu’il s’en aille en cendre et se dissoude,
Mangonneaux, fauconneaux, bat-murs, pièces à coude,
Renversant les cités dans leur fossé bourbeux;
Volcans grégeois traînés par trente jougs-de boeufs,
Canons vénitiens, serpentines lombardes;
Dieu qui dit à Coglione : attelle les bombardes;
Qui rit, pauvre blessé, du grabat où tu geins,
Que la bataille enivre avec tous ses engins,
Chaudrons à poix bouillante et fours à boulets rouges,
Qui chasse les manants éperdus de leurs bouges;
Qui rêve Te Deum qui s’endort aux accents
De l’obusier Lancastre et du mortier Paixhans ;
Qui prête, quand la mine est faite sous la brèche,
Son tonnerre du besoin pour allumer la mèche,
Et, quand la terre s’ouvre avec un large éclair,
S’épanouit de voir les gens sauter en l’air?
Vision du passé par votre âge subie!
Est-ce du Dieu jugeur? Oh! l’étrange lubie!
Dieu chancelier, portant perruque in-folio,
Vidant le procès Homme et l’Être imbroglio!
Dieu président, siégeant dans l’univers grand’chambre,
Jugeant l’âme, et bâillant, sous un ciel de décembre,
Entre l’avocat ange et l’avocat démon?
Dis, est-ce le dieu guèbre, est-ce le dieu mormon
Qu’il te faut? Ou le Dieu qui fit rouer Labarre?
Vois. Choisis. Ou le Dieu qui donne au turc barbare
Des femmes plein la tombe et plein le firmament?
Ou bien est-ce le Dieu qui fait lugubrement
Chanter, quand l’heure vient de vêpre ou de matines,
L’homme qui n’est plus homme aux chapelles sixtines,
Et qui, lui créateur, se plaît à l’écouter?
Ou parles-tu du Dieu qu’il faudrait inventer,
Que dans l’ombre la peur concède au phénomène,
Par les sages bâti sur la sagesse humaine,
Utile à ton valet, bon pour ton cuisinier,
Modérateur des sauts de l’anse du panier,
Dieu de raison qu’au fond de son spectre solaire
Le bourgeois bienveillant raille, exile et tolère,
Dieu consenti par Locke et que Grimm refusa,
Très-Haut à qui d’Holbach a donné son visa,
Éternel maçonné par le vivant qui. passe,
Entrecolonnement du temps et de l’espace,
Pièce d’architecture ajoutée après coup
A la vie, au destin, au bien, au mal, à tout,
Tour tremblante de vide et hors-d’oeuvre de l’homme?
Tous ces dieux, quel que soit le nom dont on les nomme,
Sont tout, excepté Dieu.
L’homme abject a besoin,
Étant méchant, d’un juge, et, hideux, d’un témoin;
Il veut un Dieu. C’est bien. L’homme prend de la brique,
De la pierre, du plomb, du bois, et le fabrique;
Chaque peuple a le sien; et la religion
A l’Unité pour masque et pour nom Légion.
Un temple voit la nuit où l’autre voit l’aurore;
Chéos adore Ammon que Jagrenat ignore;
Pour Delphe Odin n’est pas; la solimaniéh
Affirme Mahomet par le dolmen nié.
La terre crée un monstre et se met sous sa garde;
Et c’est avec stupeur que le grand ciel regarde
Croître sur vos fumiers ce misérable Dieu.
Nous ne nous mettons pas en peine de si peu,
Nous autres les esprits errant dans l’étendue;
Et, sans nous acharner à la lueur perdue,
Sans poursuivre l’obscure et pâle vision,
Sans exiger de l’ombre une solution,
Nous raillons dans. la nuit votre Brahma fétiche,
Dieu qui mêle à à sa barbe un infini postiche,
Dieu singe pour le nègre et Dieu peste au Thibet;
Bourreau dressant sur l’homme un immense gibet,
Boeuf a Memphis, dragon à Tyr, hydre en Chaldée,
Chimère et non raison, idole et non idée.
Ton globe, vieil enfant, joue avec ce hochet.
Homme, esprit fou qu’en vain Diogène cherchait,
Homme, tu fais pitié même aux êtres du gouffre,
Même à l’obscurité qui frissonne et qui souffre;
Car ton monde étroit rêve un rêve limité;
Il se compose un Dieu de son infirmité;
Et, dans l’abjection de ses passions vaines,
Instinct, science, amour, colère, guerres, haines,
Il se fait de sa fange une divinité!
Il pétrit de la terre avec l’éternité!
Et quand dans sa furie, et quand dans sa débauche,
Inepte, il a forgé cette effroyable ébauche,
Ce géant muet, sourd, aveugle, dur, fatal,
Ce spectre d’ombre ayant l’horreur pour piédestal,
Il achève ce Dieu de laideur, d’imposture,
De nuit, avec la peur qu’il a de la nature.
O toi qui passes là, que veux-tu donc?
Et moi:
-Je veux le nom du vrai, criai-je plein d’effroi,
Pour que je le redise à la terre inquiète.
[VII]
UNE AUTRE VOIX
Est-ce que tu serais par hasard un poète?
Qui te rend si hardi? réponds, questionneur.
Viens-tu comme Shakspeare à la tour d’Elseneur?
Pour entrer dans la brume où s’éteint la science,
Pour tenter le mystère, aurais-tu confiance,
Homme dont l’ombre fuit les pas trop approchants,
Dans le pouvoir suave et sinistre des chants?
Oui, c’est vrai, le poète est puissant. Qui l’ignore?
L’esprit, force et clarté, sort de sa voix sonore.
Trophonius est seul dans son caveau divin;
L’homme lui dit.: poète! et l’abîme: devin!
Amphion chante et met en mouvement les pierres;
Orphée errant du tigre éblouit les paupières;
Homère est dans la tombe, et son âme, à travers,
Pousse au Gange Alexandre enivré de ses vers;
Prenant forme au. plus noir de l’antre, les fantômes
Blanchissent à l’appel des blêmes Chrysostômes
Isaïe en criant: Deuil! malheur! fait hennir
Le féroce Orient qui dit: je vais venir!
Euripide, Sophocle, Eschyle qu’un dieu mine,
Sont comme le trépied d’où jaillit Salamine ;
Elle à son gré vide et lance au peuple hébreu
Les flèches de la pluie ou le carquois du feu;
L’âpre Archiloque avec le marteau de l’ïambe
Enfonce le clou sombre où se pendra Lycambe;
Dante dit, l’oeil fixé sur un homme passant
-Je t’ai vu dans l’enfer! L’homme, pâle, y descend.
La Marseillaise énorme est un bruit de mêlée;
Tyrtée est une lyre effrayante; envolée
Au-devant des combats et des drapeaux mouvants,
Et traînant, après elle un peuple dans les vents.
Les poètes profonds, hommes de la stature
Des éléments, du bien, du mal, de la nature,
Vivaient jadis, géants, en familiarité
Avec le jour, la nuit, l’ombre et l’éternité;
Ils méditaient, ayant, dans l’horreur solennelle,
Toujours devant leur âme et devant leur prunelle
La contemplation; ce mur vertigineux;
Ils avaient la science et l’ignorance en eux;
Épars, ils blanchissaient le fond des solitudes;
Ils rêvaient; ils avaient diverses attitudes;
Les uns, calmes, restaient, leur menton dans leur main,
Du côté des vivants, sur le rivage humain;
Ils regardaient passer les foules pêle-mêle,
Homme, femme, vieillard, enfant à la mamelle,
Chocs de glaives, pavois; codes, moeurs, échafauds,
Les cintres pleins d’azur des grands arcs triomphaux,
Le trône avec son roi, le prêtre avec son livre;
Et devant tout ce flot, forcené, bruyant, ivre,
Triste, joyeux, confus, violent, inclément,
Sourd, ignorant la chute et l’âpre escarpement,
Ils contemplaient de loin la mort, sombre barrage.
Les autres se tenaient hors du terrestre orage,
Comme s’ils. étaient morts, et de l’autre côté;
Ils regardaient, roulant vers eux, l’humanité
S’engouffrer sous leurs pieds, race à race engloutie;
De ce faîte, ils étaient présents à la sortie
Des empires, des faits, des grands événements,
Des prines, de puissance et de guerre écumants,
Et voyaient peuples, rois; tout ce qu’en la, nuit noire
Dégorge le. sépulcre; énorme vomitoire.
Ils rayonnaient; leurs yeux sereins étincelaient;
Ils devenaient eux-même ombre et souffle, et semblaient
Au genre humain, perdu dans ses mornes délires,
Des fantômes chantants, passant avec des lyres.
Quelques-uns, murés, sourds, n’avaient plus de regard
Que l’oeil intérieur, lumineux et hagard,
Et ces hommes sacrés, semblables à des mânes,
Hors du monde, habitaient dans l’antre de leurs crânes;
D’autres vivaient aux bois, et leurs esprits songeaient,
Et, laissant là leurs corps, éblouis, voyageaient;
Ils erraient d’être en être et. du fait a la cause;
Voyaient s’épanouir l’arbre en apothéose;
Ils allaient, pénétrant au-delà du réel,
Par la racine au gouffre et par la fleur au ciel,
Dans la création entraient le plus possible,
Tordaient l’insaisissable avec l’inaccessible,
Étudiaient comment se forment les métaux
Dans la forge invisible aux ténébreux marteaux,
Et la seve, et le feu des volcans, et les haltes
Des laves sous l’écorce affreuse des basaltes;
Le vent chantait pour eux un sublime paean;
Ils observaient l’hiver, l’Ouragan, l’océan,
L’avalanche, l’écueil, les grêles épaissies,
Les vagues, effarés de ces épilepsies;
Et, pensifs; saisissant, jusqu’aux plus hauts zéniths,
Les intersections de tous les infinis,
L’endroit où le bien nuit, l’endroit où le mal aine,
Ils tâchaient de trouver le point fatal, suprême,
Terrible, surprenant, caché sous le linceul,
Sombre, où tous les secrets se fondent en un seul!
Dans les grottes de l’Inde ou dans les rocs d’Eubée,
Lieux où l’on croit toujours être à la nuit tombée,
À Cartlane où la fleur mandragore chanta,
A Delphe, à Summum, dans l’île Éléphanta,
Ou dans la Bactriane ou dans la Sogdiane,
Ou dans les monts qu’emplit la sinistre Diane,
Dans les déserts où l’être a l’air de se mouvoir
En dégageant. un sombre et lugubre pouvoir,
Les pâtres rencontraient un homme dont la face
Semblait une lueur étrange de l’espace, ,
Dont la bouche parlait, et dont l’égarement
Ramenait tout à lui comme un farouche aimant;
Le loup craignait cet homme, et les brutes fuyantes
S’en allaient de son ombre encor plus effrayantes;
Et toute chose douce à ses pieds triomphait,
L’agneau, l’aube; et c’était le poète en effet.
Et de quoi vivait-il? Nul ne le sait. Son âme
Aspirait l’inconnu comme un puissant dictame;
Sa chair s’oubliait l’homme était en lui dissous;
Du, splendide Univers il tâtait le dessous;
Livide, il assistait aux blancheurs idéales,
Aux détonations d’aurores boréales,
Aux déluges roulant dans leurs vastes limons
Des hydres qui semblaient des gouffres et des monts,
Aux chaos combattant la vie, aux héroïsmes –
Des: globes traversant ces. rudes cataclysmes,
Au miracle, à l’atome; et son regard voyait
Des naissances d’édens dans l’abîme inquiet,
Des jets d’étoiles d’or, des chutes de décombres,
Et des explosions. de créations sombres.
Et pendant qu’il rêvait, immobile,voyant
L’inouï, -l’ignoré, le-trouble, l’ondoyant,
Les visions, l’azur indicible, feux, nimbes,
Masques crispés d’enfants sanglotant dans les limbes,
Et la torche de l’astre allant mettre le feu
A des mondes perdus au fond du vide bleu,
Et la larve, à: travers les brumes. décuplantes,
Entre les doigts des pieds il lui poussait des plantes,
Et les feuilles, qui font leur ouvrage sans bruit,.
Couvraient cet homme ainsi qu’un chêne dans la nuit.
Et cette intimité formidable avec l’être
Faisait de e songeur farouche, plus: qu’un prêtre,
Plus qu’un augure, plus qu’un pontife; un esprit;
Un spectre à qui, la mort radieuse sourit.
Et c’est de là que vient cette auguste puissance
Faite d’immensité, d’épouvante, d’essence,
Qu’a le poète saint et, qu’on sent dans ses vers
Les prodiges au fond du mystère entr’ouverts
Mêlent leur rayon fauve à son âme élargie,
Presque jusqu’à l’horreur et jusqu’à la magie,
Et qui parfois Côtoie, ainsi qu’un noir plongeur;
Le cercle où de l’enfer commence la roûgeur:
Oui, le poète peut ce qu’il veut; le poète
Arrête en lui parlant l’immense gypaète;
Il domine la ville et le désert; il peut
Unir la terre au ciel; et, dans le même noeud,
L’idéal au réel, et tisser une-‘toile
Avec des fils de chanvre et des rayons d’étoile;
Il dégage de tout, du fait, vaste ou petit,
De tout ce qu’on apprend, dé tout ce qu’on bâtit,
Du progrès, du tombeau,de la matière même,
Une grande Uranie azurée et suprême;
Il met sur la science un plafond sidéral;
Il fait tomber la haine:et l’épine-et-le mal.
Ce nom déborde vaste,. inouï, réfractaire,
Quelque être que ce soit, au. ciel et sur la terre.
O passant, entends-tu bégayer à la fois
Par toutes les rumeurs et par toutes les voix-
De la création ténébreuse et murée,
Par toute l’étendue et toute la durée,
Ce nom mystérieux, énorme, illimité?
Le printemps et l’automne et l’hiver et l’été
Sont quatre accents divers de` ce grand nom qui gronde;
La syllabe du vent n’est pas elle de l’onde;
Chaque être dit la sienne et la murmure. à part;
L’antilope en a peur. quand c’est le léopard.
Qui le_ proclame au fond de:la forêt sonore;
Et la nuit le prononce autrement, que l’aurore.
L’homme à saisir ce mot s’est parfois occupé;
Mais en vain; car ce nom ineffable est coupé
En autant de tronçons qu’il est de créatures;
Il est épars au loin dans les autres natures;
‘Personne n’a l’alpha, personne l’oméga;
Ce nom, qu’en expirant le passé nous légua,
Sera continué par ceux qui sont a naître;
Et tout l’univers n’a qu’un objet: nommer l’être!
Et des soleils sont morts et des soleils mourront,
Et l’espace où l’étoile éclôt, la flamme au front,
A. vu naître et pâlir dans ses profondeurs fauves
Des feux qui ne sont plus que de vieux astres chauves;
L’heure apporte et reprend les jours, les mois, les ans,
Et la. mémoire avorte à compter ces passants,
Et l’ombre épouvantable en ses aveugles ondes
Roule des millions de millions de mondes,
Et le sillon engendre et la fosse enfouit,
Et tout se développe et tout s’évanouit,
Et tout brille et s’éteint; mon phosphore et le-vôtre,
Et-les êtres confus tombent l’un après » l’autre,
Et toujours, à jamais, sans qu’il cesse un moment
D’emplir le jour, la nuit,l’éther, le firmament,
Sans qu’aucun autre bruit l’interrompe et s’y mêle,
Le nom infini sort de la bouche éternelle!
De la ronce hideuse et de l’âme méchante;
Tendre, il plane au-dessus du cirque horrible et chante
Pour les martyrs un chant qui fait honte aux lions;
A la guerre civile il fait dire: oublions!
Il prend les coeurs lointains des peuples et les mêle,
Accouple à la raison la foi, sa soeur jumelle,
Calme la foule, endort le flot, dompte le feu,
Change l’homme; il peut tout; hors ceci: nommer Dieu.
Nommer Dieu de façon que l’abîme comprenne.
Il peut tout, hors ceci: faire à l’aube sereine,
Au lys, à l’astre, à l’hydre, à l’éclair enflammé,
Dire dans l’étendue obscure: il, l’a nommé!
[VIII]
UNE AUTRE VOIX
Est-ce que, voyageur fatal, tu prémédites
Des actions de rêve étranges et maudites,
D’aller, de forcer l’Ombre, et fouillant, et bravant,
De t’enfoncer plus loin que les ailes du vent?
Dis. Parle. Oh! les songeurs ont une sombre envie
Ils voudraient tous avoir déjà franchi la. vie,
Pour connaître, pour être ailleurs, pour voir plus loin.
Pour eux, vivre est l’Obstacle et savoir le besoin.
En attendant la tombe, ils s’en vont aux nuées,
Par les rêves de l’homme en bas continuées,
Aux vents, aux monts; aux lieux déserts, aux lieux secrets,
À tout ce qui contient de l’abîme, forêts,
Antres, écueils des mers, nids d’où tombe la plume,
À la, fleur qui s’entr’ouvre, à l’astre qui s’allume,
A tout ce qui voit l’ombre et tremble sur le bord,
Désaltérer leur soif lugubre de la mort.
As-tu donc aussi, toi, cette soif surhumaine?
Veux-tu voir? Est-ce là, passant, ce qui t’amène?
Sois tranquille, homme. Attends.: Cela finit toujours
Par s’ouvrir devant toi, pauvre ombre aux instants courts.
Le mystère, à présent sans clef, sans déchirure,
Clos, fermé par la nuit, la sinistre serrure,
T’apparaît, recouvrant on ne sait quel écrou,
Barré, farouche, ayant tout l’azur pour verrou;
Ton cadavre en tombant défonce cette porte.
Le ciel noir plie et s’ouvre au, poids de la chair morte.
L’homme entre enfin au gouffre exécrable ou béni.
Par la fente que fait la mort à l’infini.
Attends donc cette mort. qui fait l’âme complète,
La pénétration de. Dieu dans ton. squelette,
Les astres, plus nombreux, quand l’homme n’est pas noir,
Dans les plis du linceul que dans les plis du soir;
Attends l’ascension suprême de la chute;
Attends la fin du songe, homme, et de la minute.
Cette explication qu’on nomme éternité.
Tout ce que tu peux faire en ton humanité,
-Écoute, dans, ta chair, homme, dans ta bassesse,
C’est de chercher, partout, de contempler sans, cesse,
De loin, de près, avec ton coeur et ta raison,
Le trépas qui jamais ne manque à l’horizon,
C’est d’observer toujours, à travers ta souffrance,
Ce visage sinistre et noir de l’espérance,
Homme, et de ne jamais quitter des yeux la mort,
Et de vivre tourné, comme l’aiguille au nord,
Vers ce but de-ta route; ô pauvre âme asservie!
La mort est. la veilleuse étrange de la v
Wouesh Totor ! Bien ou bien ?
javoo j’me suis un peu inspiré…
j’ai tellement pas de culture que j’ai cru que c’était de toi
Tes épithètes sont souvent superflues et toujours mal senties. 1/20.
GEORGES !
Tu es encore là !! J’ai besoin de toi Georges. Reviens… Reste…
En général, je préfère m’abstenir de commenter puisque je n’ai pas beaucoup d’humour. Et puis plusieurs fois j’ai écrit des pavés perdus à cause que l’adresse mail était invalide. Et puis, et puis j’aime pas ce site internet. J’suis sur oklm pendant que vous lisez l’Express.
pk je peux pas poster mes beaux poèmes en commentaires bande de putain de putes à quatre pattes ?
yoooooooooooooooooooo
Parce que je suis le final boss des poèmes personne d’autre ne me fera concurrence, pigé gros lard ? Étouffe-toi avec tes chips et ta vieille poésie Monster Munch de merde.
(Mets ta poésie sur Github, sinon ca vient peut-être de ton adresse mail qui est reconnue comme spam. Retente)
Deeplake aime les cakes
Hum c’est bon, hum c’est bon !
Deeplake aime les cakes
Fourrés au saucisson.
tain comment c’est trop de la crotte ton poème, mdrrrr, même posté anonymement sur un site paumé j’aurais honte de balancer ça mdrrrr
la rime est pauvre, le mètre non respecté, le style navrant de paresse autosuffisante, 0.2/20
J’te baise Antonin, t’es peut être entré dans l’histoire grâce à ta coupe à la Nicolas Cage, mais t’es même pas foutu de reconnaître le vrai génie, celui du petit quatrain confortable dans lequel on invente même un genre de gâteau.
Connard
Mauvais
L’univers entier est composé d’eau
sauf ta gorge qui regorge de mon foutre
ok ok ok….
je me la raconte negro, normal j’ai laissé mon humilité dans la chatte à ta mère
tu pense pouvoir me test mais tu ne survis pas une minute dans mon terter…
ma vulgarité à outrance cherche à palier un manque de charisme et d’intellect
je ne suis pas aussi dangereux et criminel que le prétendent mes textes
lyrique ou lyrical, je ne sais pas ce que ça veut dire, je fais des rimes
ça passe pour un signe de fine maîtrise du verbe alors je fais des rimes
je ne suis point différent du fouteur de merde sans avenir de base,
mon corps stéroïdé, ma voix autotuné, plongent ma dignité dans une catabase
je nourris des rêves d’ascensions bancaires en prêchant la consommation
les millions et les gros cul guérissent ils ma frustration ?
Nul
moi j’ia bien aimé, c’est peut-être justement mauvais signe.
T’as surement dû aimer ça par flemme, souvent je tombe dans le panneau, me disant : Ah ouais, pas mauvais.
Mais c’est juste que je viens de me réveiller et que je suis pas encore aller chier, parce que je préfère quand même faire ça le matin, la journée se déroule pépère, le ventre et l’esprit léger, c’est bien plus facile de discerner la merde des autres par la suite.
Chier le matin, c’est ce garantir une journée sans chagrin.
Tu m’follow sur twitter ?
Nan mais en vrai c’est pas mal. Certains verront un bolosse qui laisse transpirer sa rage à travers un second degré pété mais le Ra
Hum. D’accord.
C’est très mauvais, garçon. Tu devrais cesser de me suivre sur twitter, instagram, te mettre à la musculation et à la pensée positive afin de guérir de ta frustration.
SEGPA for life, j’ai fait le tour de tes textes.
c’est quand même dommage de dire des gros mots à chacune de mes rares participations icis. Mais dans le fond je ne vous hais pas
bon les gars, vous voulez pas faire un autre article ?
C’est clair, ça glande sévère la, faut faire quelque chose, bougez vous un peu le cul
Moi perso depuis que j’ai découvert ce jeu https://agar.io/ j’ai mis de coté mon implication sur mpsi, mes révisions de partiel, ma vie sociale (nan jdec j’en ai jamais eu) bref mon existence pour essayer d’être number one.
J’ai kiffé la musique
Salut vlv, j’ai vu ton père hier à la Gaypride de Rouen.
Salut Yannick, Effectivement et il m’a précisé qu’il conduisait le char sur lequel tu dansais.
imag:https://www.wheelchair.ch/fra/info/images/wheelchair_heels.jpg